Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le Monde de kikushiyo
8 juin 2014

La Bête Humaine - de Jean Renoir (1938)

Histoire : Jacques Lantier, conducteur de locomotive sur la ligne Paris-Le Havre, souffre par intermittence de pulsions agressives violentes (...). Il ne peut pas envisager de se marier. Une tentative avec Flore, (...), se solde par un échec cuisant.la bête humaine Au Havre, Roubaud le chef de gare a une altercation avec un passager influent qui le menace. Il demande à sa jeune femme Séverine d'intercéder en sa faveur auprès de son parrain Grandmorin, pour qu'il use de son influence pour mettre fin à l'incident. Séverine s'exécute, mais à son retour, un lapsus fait naître des doutes dans l'esprit de son mari. Il la rudoye et elle avoue. Elle a été la maîtresse de son parrain dès son plus jeune âge. Roubaud la force alors à lui tendre un guet-apens.(...) Les rapports entre Séverine et son mari se sont tendus au fur et à mesure que les rapports avec Lantier sont devenus plus intimes. ("Jean Renoir, Le jeu et la règle" de Roger Viry-Babel, éditions Denoël).

Commentaire : Démarrage sur les chapeaux de roue d'un film lancé à pleine vapeur. Avec Jean Gabin et Carette, chauffeurs de  locomotives d'un autre temps. On reste imprégné par les odeurs d'huile et de charbon. Ce film atteint des sommets de narration et la direction des acteurs y est remarquable. Au-delà de sa qualité cinématographique, c'est une oeuvre très esthétique où tout est maîtrisé. J'y retrouve le même plaisir de l'image qu'avec les films des grands maîtres du cinéma japonais (Kurosawa, Mizogushi, Ozu, ...), mais ce qui le singularise est l'intrigue orchestrée au millimêtre et l'art du suspens qui transpire de l'oeuvre.

Jean Renoir s'inspire de "La bête humaine" de Emile Zola. Il s'intéresse à la descendance de la famille Rougon-Macquart en la personne de Jacques Lantier, l'un des fils d'Auguste Lantier. Jacques est le fruit d'une histoire faite d'inceste, d'alcool et d'autres vices. D'emblée, Renoir cite Zola : "A certaines heures, il la sentait bien cette fêlure héréditaire. Et il en venait à penser qu'il payait pour les autres... les pères, les grand-pères qui avaient bu... les générations d'ivrognes dont il était le sang gâté." C'est Jacques Lacan qui évoquait, me semble-t'il,  les incidences de générations successives pour faire un psychotique. Il est  vrai que Jacques Lantier présente quelques troubles de la personnalité qui paraissent préoccupants. Je pense qu'aujourd'hui on parlerait de schizophrénie ou "bipolarité". Quoiqu'il en soit, il est parfois saisi de pulsions ou de fréquentes absences.

la bête humaine(2)

 Si les rôles féminins sont empreints de beaucoup d'émotion, Simone Simon peut utiliser sa beauté hypnotique pour fomenter des actions machiavéliques. Sous l'emprise de son charme, les hommes commettent parfois l'irréparable. Simone Simon gardera son côté mystérieux pour interpréter en 1942 "La féline" de Jacques Tourneur à Hollywood.

 Évoquer en 1938, comme le fait Renoir, la question des violences domestiques chez les gens ordinaires est  assez visionnaire puisqu'il pense à juste raison que ce sont ces petites gens qui font le terreau des partis de l'extrême qui commencent à prendre de la place en Europe. Fernand Ledoux interprète admirablement bien le chef Roubaud, sorte de tyran domestique qui fait le vide autour de sa jeune femme qui aspire à d'autres horizons.

Je n'ai pas à l'esprit d'autre film que "La bête humaine" qui ait rendu de manière aussi intense la relation entre l'homme et la machine à vapeur. Ces travelling sur la locomotive lancée à toute allure sont à couper le souffle.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
le Monde de kikushiyo
Derniers commentaires
Publicité