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le Monde de kikushiyo
13 avril 2014

Le gâchis des généraux - de Pierre Miquel (2001)

"Le gâchis des généraux" est paru en 2001 chez Plon. Le sous-titre est précisément "Les erreurs de commandement pendant la guerre de 14-18". Ce qui ressort de cet ouvrage, sans ambiguïté possible, c'est que l'entrée de la France dans la Grande Guerre, dès août 1914, s'est faite avec très peu de généraux et encore moins avec de grands stratèges. Non, on ne peut dire que la préparation de la guerre et la stratégie aient marqué les esprits par leur audace. Cette faiblesse des offensives est très tôt perceptible, dès la guerre des frontières en 1914. Il y a de quoi rire... jaune j'entends.

le gachis des generaux

Dans ce livre court, Pierre Miquel, historien de la première guerre mondiale, dénoue les noeuds qui existaient au sein de l'état major de l'armée française. Un fonctionnement englué par des enjeux qui n'ont rien à voir avec les règles militaires. Ici, l'Art de la guerre ne se joue pas avec n'importe qui, tout dépend de son appartenance, qu'elle soit franc-maçonne ou bien d'obédience Saint-Cyrienne ou Polytechnicienne, les uns ne se mélangeant pas avec les autres. Même en temps de guerre, l'union sacrée des généraux n'était qu'un mythe. L'affaire Dreyfus n'était pas si lointaine et beaucoup d'Officiers en étaient encore marqués dans leur chair.

Déjà, lors de la crise du "coup d'Agadir" en 1911, après que l'Allemagne ait envoyé une canonnière à Agadir, la guerre avait été évitée d'un cheveu. Le président du Conseil, Joseph Caillaux, avait demandé à Joffre si la France était prête à la guerre. La réponse négative n'a pas servi de déclic pour préparer une véritable armée d'active. Si ce n'est la préparation de loi d'une conscription qui devait passer à 3 années. Loi votée en 1913.

On regrettera aussi que l'Etat major français ne se soit pas inspiré des guerres balkaniques ou bien de la guerre russo-japonaise (1904-1905), pour s'apercevoir que désormais la guerre se modernisait, qu'elle s'industrialisait et que les vieilles méthodes napoléoniennes étaient obsolètes. A la décharge de Joffre, celui-ci demandait le financement de nouveaux armements, notamment des pièces d'artillerie. Or, la coutume française veut que l'on remette entre les mains du peuple les décisions stratégiques, en l'occurence à son parlement. Ainsi, le turn-over important des ministres de la guerre à cette époque ne permet pas d'instaurer une cohérence quant aux subventionnements des matériels militaires de première importance. A l'inverse de l'Allemagne où la défense du pays ne repose qu'entre les mains d'un seul homme, le Kaiser Guillaume II, la France est soumise aux aléas des nominations ministérielles et des gouvernements successifs. Par conséquent, lorsqu'il a fallu que la loi de finance avalise quatre vingt millions nécessaires à des projets d'artillerie lourde de plus de 150 mm, cela a été possible, puis ne l'a plus été, en raison d'un nouveau remaniement ministériel. L'armée est donc restée avec ses canons de 75 mm. Cela peut expliquer en partie les pertes humaines énormes d'août 1914 puisque les avancées n'étaient aucunement soutenues par l'artillerie : "Comment détruire les pièces lourdes allemandes ? On ignore leur positon. Le seul ballon captif disponible a été abattu par l'ennemi le 29 août (1914). Pas un seul avion d'observation sauf un coucou rafistolé qui s'écrase à l'atterrissage. Par pigeon voyageur, le gouverneur réclame d'urgence le secours de l'aviation. Le grand quartier général alerté promet le décollage de l'as des as, Pégoud. Celui-ci ne paraîtra jamais dans le ciel de Maubeuge." (p.91)

Cet ouvrage traite de nombreuses aberrations de cette Grande Guerre, en partie générées par l'incompétence des nos généraux. Cela va de l'offensive à outrance de Joffre, au carnage du Chemin de Dames orchestré par le pire de tous, Nivelle. Le général Pétain semble le seul à tirer son épingle du jeu pour l'auteur Pierre Miquel.

Ce qu'il y a de surprenant, c'est que, malgré cette débandade de l'armée française, ni le général en chef Joffre, ni même aucun autre général n'ont été jugé responsable (paradoxalement : "Des trois généraux commandant en chef les armées françaises en 1914-1918, Joffre, Nivelle et Pétain, deux ont été faits maréchaux de France."...p.11).

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